Aidant : apprendre à lâcher prise

Proche aidant au sommet d'une montagne.

En France, selon les Echos, 30% des aidants décèdent des suites d’une maladie avant la personne aidée. Un chiffre inquiétant qui illustre une dure réalité : beaucoup d’aidants n’ont pas conscience des conséquences de ce nouveau statut sur leur santé.

Être aidant ne signifie pas de s’oublier pour la personne aidée. Ce statut, généralement improvisé, nécessite de prendre soin de soi et de mettre en place une organisation en accord avec son rythme de vie et ses besoins. La question du répit des aidants est dès lors centrale.

> Faire une évaluation des besoins gratuite avec un coordinateur social

 Depuis quelques mois MonSenior et le Département du Rhône expérimentent une solution de répit en accueil familial. Pour mieux comprendre les besoins des aidants et le rôle du dispositif accueil familial en matière de répit, nous avons interrogé Guillaume Pistilli, psychologue pour le Département du Rhône depuis 16 ans.

 Guillaume Pistilli participe notamment au recrutement des candidats à l’agrément accueil familial, oriente les demandes d’accueillis et suit les accueils en cours.

Aidant : importance du lâcher prise

Pouvez-vous décrire les conséquences (psychiques et physiques) sur le long terme pour un aidant s'il ne se fait pas aider ?

Le parent, l’ami, le proche, s’efface petit à petit au profit de la fonction d’aidant. Un glissement s’opère de l’un à l’autre favorisé par la nécessité de faire. Les actes concrets à réaliser ne manquent pas ni les solutions qu’il se doit de trouver en permanence puisqu’il s’estime le mieux placé. L’aidant seul, en vient à laisser sa propre vie de côté. Ses pensées ainsi que ses actions sont dirigées vers la personne aidée au détriment de sa propre vie et de son entourage. S’installe insidieusement une fatigue qui souvent commence par s’inscrire dans le corps (troubles du sommeil, digestifs, irritabilité, douleurs, etc..) pouvant déboucher ensuite sur une véritable dépression ou des symptômes apparentés au « burn-out “.

Pourquoi, selon vous, est-il si compliqué pour un aidant de demander de l’aide et de prendre soin de lui ?

“Ce sont les liens affectifs qui font que l’on s’engage dans une relation d’aide. Et toujours lorsque les affects sont en jeu, la Raison, le raisonnable, est remisé à la marge. Ce peut être aussi une injonction familiale forte qui désigne explicitement ou implicitement un de ses membres comme devant répondre aux besoins du moment. Un devoir moral, des croyances ou l’écume de conflits individuels non réglés peuvent aussi être à l’œuvre. Tout cela relève de la sphère privée ; on comprend alors que l’ouverture sur l’extérieur par la demande d’aide ne va pas de soi.

Il faut accompagner l’aidant pour mettre en évidence l’impact que cette aide apportée a sur sa propre vie.

“Ne pas déposséder l’aidant de son rôle mais l’épauler au mieux.”

Pouvez-vous donner 5 conseils clés pour les aidants qui accompagnent une personne en perte d’autonomie ?

"Être aidant s’apprend. Si la capacité d’aider un proche sereinement sans mettre en balance sa propre vie est possible pour certains. Pour d’autres cela peut relever d’un apprentissage ou du moins d’un accompagnement." Guillaume Pistilli partage 5 conseils pour vivre au mieux son rôle d'aidant :

  • Parvenir à se reconnaître comme aidant.
  • Interroger ses propres limites.
  • Ne pas déposséder l’aidant de son rôle mais l’épauler au mieux.
  • Aider sans s’épuiser est tout à fait possible.
  • Ne pas négliger ses émotions et ressentis. Les partager.

L’accueil familial : un soutien pour les aidants

Quels bénéfices apporte selon vous l’accueil familial tant pour les accueillants que pour les personnes accueillies ?

“Pour les accueillants, c’est la possibilité de faire coïncider un métier, une activité professionnelle donc une rémunération avec un besoin d’accomplissement personnel. Exercer un métier qui, pour eux, a du sens. Les candidats à l’agrément ont parfois eu des expériences professionnelles ou personnelles marquantes et parfois désagréables avec le milieu du soin, de l’aide à la personne, de la maladie ou du vieillissement. Ils sont convaincus qu’il leur est possible de mieux faire si on leur en donne la possibilité.

Du côté des accueillis, cela dépend de la problématique initiale. Un accueil familial social peut permettre de rompre une situation d’isolement, de sortir des personnes d’hospitalisations chroniques faute de solution de lieu de vie adapté. Cela présente aussi une alternative à taille humaine à une orientation institutionnelle parfois peu adaptée.”

Pouvez-vous présenter votre rôle sur le département et les personnes que vous accompagnez ?

“Mon rôle au sein du dispositif d’accueil familial social du Département du Rhône revêt différents aspects selon les parties prenantes que sont les accueillants, les personnes accueillies et parfois leurs familles, les services hospitaliers demandeurs de solution de lieu de vie ou encore les mandataires judiciaires. (...) Le Département du Rhône propose à ses accueillants agréés, que je rencontre, à des fins d’évaluation, les personnes souhaitant être accueillies dans une de nos familles. Je tente ainsi d’apporter un éclairage sur les profils et affections psychiques dont ils sont souvent porteurs. Cela permet d’échanger avec les accueillants sur leurs ressentis suite au premier contact qu’ils ont pu avoir avec une personne candidate à l’accueil familial social. Mais la décision finale d’accueillir ou pas leur appartient. Je reste à leurs côtés tout au long de leurs accueils pour leur proposer des clefs de compréhension de certains comportements qui peuvent parfois les surprendre.”

 

Aujourd'hui le Rhône souhaite s’appuyer sur l’accueil familial pour élargir l’offre de répit destinée aux aidants familiaux. Plus largement, ce dispositif s’inscrit déjà dans le schéma départemental des solidarités et apparait comme un mode alternatif d’habitat et d’accompagnement pour les personnes âgées ou en situation de handicap. 

L’objectif du partenariat entre le Département du Rhône et MonSenior, est double : expérimenter la solution de répit en accueil familial et redynamiser le dispositif par des actions de communication et de valorisations du métier. Le département, chef de file de la politique de solidarités en faveur des personnes âgées ou en situation de handicap, a fait le choix de recourir aux services de MonSenior en tant que « Tiers Régulateur ». Ce dernier assure le rôle de tiers de confiance de la relation entre l’accueillant, la personne accueillie, sa famille et le Département lors de séjours de répit en accueil familial.

Echange avec une coordinatrice sociale de MonSenior